mercredi 3 juillet 2013

Lettre à une tonkinoise



Salut les fulots !
Je ne poste plus. C'est vrai.
Période grinçante et désagréable.
J'écris beaucoup mais dans un petit cahier et je ne souhaite pas le publier.


En attendant que les choses bougent (et je ne doute pas qu'elles bougent dans un sens ou un autre), je vous propose de lire une lettre que j'ai retrouvé dans un cahier d'écriture que j'avais il y a un bout.

Elle est adressé à une jeune fille qui m'émouvait particulièrement à cette époque.

Allez, je vous laisse avec mon moi d'avant !

Force et robustesse !



9 juillet 2005,
Lettre à une tonkinoise.

Simon et Olivier sont partis à la ville.
A Tournon sur Rhône, dans les bars.
Je suis seul.

Depuis une semaine de collectivité.
Enfin seul...

Il y a moi et le feu.
Ça tient bien la place d'une personne sans les désagréments.
Et puis j'ai d'autres compagnons.
Les sempiternelles amis Vodka et Cigarette,
mon chapeau de cowboy que je mets pour me protéger du soleil (bin voyons),
une dizaine de grenouilles (qui ont organisé un concours de chant des plus agréables)
Et une chauve souris. Attirée par le feu ou par moi.

Ah oui ! Et puis aussi mon cahier et le stylo.
Ce qui fait dix-sept amis. (si l'on considère que les grenouilles sont effectivement dix)

En fin de compte, je ne suis pas seul non.

Imagine. Au bord du Doux (n'importe quelle rivière fera l'affaire)
Seul (...)
Le feu.
La nuit.
Les bruits de la nuit.
Tout un tas de pensées, mélancoliques, douces, sinistres, d'espoir, de désespoir, de tristesse, de tendresse, de rage, de peur, de bien être...

Je remets du bois dans le feu.
Je bois une gorgée de vodka.
J'allume une cigarette.
Je partirais quand le feu mourra...

J'entends les bruits des poissons qui sautent dans l'eau.
Un train passe, plus loin dans la vallée.
Le feu me chauffe les jambes.
Sans passé. Sans futur.

Je suis là.

Un insecte m grimpe sur le ventre.
Et s'envole.

Je ne sais pas si j'apprécie vraiment ce moment là pleinement.
Parce que toujours dans ces moments là, je voudrais partager ça avec quelqu'un.
Quelqu'un de tout féminin.
C'est pas bien.
Je devrais me suffire.

Je rajoute du bois.
Je pense à John qui ne court qu'après ces moments là, lui aussi.

Il n'y a pas d'étoiles.
Un autre train passe.

Je cherche toutes les présences qui peuvent m'aider à rester le plus longtemps possible tout seul près du feu qui meurt.
Les cailloux.
Une autre cigarette.
Les grenouilles.
L'herbe.
Les arbres.
La petite chaleur du feu et de la vodka.
Le sable.
Les grenouilles.
Un chien qui aboit au loin.
Un morceau de bois que Simon a taillé.

Les souvenirs.

Des yeux de filles.
Un repas à Toulouse avec mon père et ses amis.
Une marche dans la grève bretonne avec ma mère sous la pluie et le vent.
Zoé s'est ouvert le front en tombant du trapèze.
Deux jours passés à pleurer avec John dans une chambre à Bucarest. Pour rien.
La roulotte de Mourmeli s'est embourbé.
Je nage avec mon frère Nils.
Il y a des dauphins.
J'ai vu Le temps des gitans sur une télé pourrie dans une cave.
L'odeur de tourbe en Irlande.

Daniel.
Malèle.
Mourad.
Marylin.
Elvira Fuentes Meis et sa mèche blanche.
L'accordéon.

(le feu va mourir)

Hugues.
Emir.
Alexandra.
Jeremy.
Sophia.
Denis le lion.
Shunka.
Klas.

La pluie sur le pays de Caux.
Des gateaux à Jaisalmer.
Des nuages en dessous de moi sur une montagne.
Le canal du midi à vélo.
Le bateau.

Merde je pleure.

Un van sous la neige, la nuit.
Jacques Brel.
Kate, Laurent, et moi allongé sur une route à Wanchy Capval.

Ma dernière cigarette.

Le dernier en date : la tonkinoise, partie à Taïwan.

Le feu s’éteint, je vais me coucher.   
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